Foujita est un artiste japonais venu en France en août 2013 après avoir suivi une formation de dessin classique dans son pays natal. Il participera de l’effervescence des années folles à Paris et bien que contraint de regagner le Japon au moment de la seconde guerre mondiale, il reviendra en France où il résidera jusqu’à la fin de sa vie.
Le musée Bourdelle de Paris lui consacre actuellement une exposition ( jusqu’au 15 juillet 2018). Celle-ci permet de retracer son parcours artistique en France, l’influence des artistes qu’il côtoyait tels que Modigliani, qui l’ont inspiré, tels que Eugène Atget ou le Douanier Rousseau.
L’exposition comprend de grandes toiles retraçant l’ambiance des cabarets de ces années, avec les jeunes femmes dévêtues. On peut aussi découvrir de nombreuses photographies de Foujita entouré des autres grandes figures de ces années. On discerne les ombres de la fameuse Kiki, ainsi que celles des compagnes des artistes surréalistes. Foujita avait bien compris l’intérêt de jouer avec son image. Il se mettait ainsi en scène dans des tenues extravagantes qu’il cousait lui même. On pense aussi à sa coupe de cheveux iconique, sa boucle d’oreille, sa frange tombant sur ses petites lunettes rondes. Cette ambiance est aussi retranscrite par des reproductions de photographies agrandies au format mural. | |
Sont également exposés les portraits de femme réalisés par Foujita dans une synthèse entre l’art occidental et la technique de l’estampe. L’ovale des visages rappelle les portraits de Modigliani et les portraits sacrés. |
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La finesse du tracé, la grâce des mouvements constitue une subtile synthèse entre les estampes et l’art occidental sacré auquel Foujita se consacrera plus tard. En effet, il fit construire une chapelle à côté de Reims qu’il décorera après s’être converti au catholicisme en 1959. |
La seconde partie de l’exposition montre les nus et les portraits réalisés par Foujita qui sont d’une finesse inouïe. Sur un papier immaculé préparé par Foujita selon une technique élaborée au fil des années pour rendre la toile suffisamment rigide pour être sensible au moindre trait, des camaïeux de gris réhaussés par de l’or pour les cheveux modèlent les corps tracé., tracent les zones d’ombre imperceptiblement. Le grain de la peau est fin et velouté. Les visages sont modelés, comme les corps, de quelques ombres. |
Les portraits consacrés aux enfants sont tout aussi délicats. Les nus et les portraits d’enfants de même que les nombreux autoportraits ont en commun leurs regards mélancoliques, perdus dans le vague, ne rencontrant pas celui des spectateurs. De ce fait, la nudité des corps n’est pas un sujet d’érotisme. Et les vêtements sages des enfants ne font pas d’eux des images d’épinal de l’enfance. Il y a chez les uns et chez les autres une forme de gravité dépassant la mise en scène qu’impliquent la séance de pose ou la réalisation d’un autoportrait. Ces blancs très clairs sont ils une réminiscence du traumatisme subi par Foujita dans sa prime quand il retrouva sa mère morte derrière un paravent retourné et donc blanc ? Le blanc renvoie aussi au surnom de sa seconde compagne surnommée Youki, blanc en japonais. Toujours est il que son oeuvre ne peut se résumer à la personnalité haute en couleur de l’artiste pendant la période des années folles et que derrière la joie de vivre du milieu artistique, une forte gravité imprègne tous ces portraits. | |
C’est toutefois une autre vision de l’enfance qui ressort de plus larges compositions. On retrouve les tons blanc/beige et des enfants nus évoluant dans un décor naïf et ciselé. Le temps y est comme suspendu, tout comme les enfants et les chiots qui les entourent saisis dans leurs sauts, les pieds décollés du sol. Mais ce n’est pas le mouvement qui est mis en avant ; un fort sentiment de quiétude et d’apaisement émane de l’oeuvre, les corps se fondant dans le décor pour en devenir une des composantes. | |
Foujita Composition au Chien 1928 |
Au rez de chaussée, l’exposition se poursuit pas des toiles monumentales aussi hautes que la pièce, reprenant cette même technique de camaïeux très clairs modelant fine les formes. Celles-ci ont vraisemblablement été dessinées pour décorer le bâtiment japonais de la cité universitaire mais en définitive, le projet n’a pas abouti. Les formes sont épurées, les courbes élégantes et chaque partie de la toile attire l’œil qui ne sait où s’arrêter devant tant des œuvres d’une telle grandeur et d’une telle richesse. On y reconnaît des lions en cage, des chats. Des hommes et des femmes posant nus pour un artiste imaginaire devant ou derrière un tableau représentant lui même une femme nue surmonté d’un angelot. Ces corps nus sont noueux et immobilisés dans des mouvements, comme statufiés dans l’instant. |
La même année, en 1929, Foujita réalisera un décor réalisé dans la tradition japonaise pour le Cercle de l’Union Interaliée. Il reprend les codes de ce type de décor (tonalités sombres, aplats de couleur dorée, représentation de la nature) tout en l’adaptant au goût occidental en représentant des fleurs et des animaux occidentaux. |
Enfin, la dernière partie de l’exposition montre les objets que Foujita disposait dans son atelier, l’agencement de ceux-ci révélant encore le sens du détail et la finesse de la composition et la recherche de l’harmonie dans les objets du quotidien, tels que des objets de couture. |
Pour aller plus loin :
- Lien vers l’article de Kertesz
- Podcast de la Fabrique de l’Histoire
- Le site vers le musée Maillol
- Catalogue de l’exposition Foujita et ses amis du Montparnasse à la Grande Halle du Musée de Chamerolle ( 30 juin au 19 septembre 2010)
- Catalogue de l’exposition Foujita, Peindre dans les années folles au Musée Bourdelle
- Collection DVD Les Aventuriers de l’Art moderne chez Arte Editions
Réalisateurs : Amélie Harrault, Pauline Gaillard, Valérie Loiseleux
qui ne parle de Foujita à proprement parler mais retrace l’effervescence artistique des années folles.