Retour aujourd’hui dans l’univers de l’art mais pas celui de l’excellence où l’on regarde cérémonieusement l’oeuvre produite et  celui qui SAIT peindre ou dessiner. Alain SERRES nous entraîne avec trois enfants qui épient, sans oser d’abord l’approcher M. Bâ, lequel  vient d’investir l’atelier du bas de leur immeuble et qui passe ses journées à dessiner à l’encre de chine. L’homme s’ouvre à eux et les guide pour leur apprendre avant tout à dépasser l’appréhension de rendre compte de la réalité. Les enfants sont quant à eux fascinés par la facilité du peintre à ébaucher en quelques lignes un titre, un visage, un rosier  et si rapidement, qu’on a l’impression que le dessin surgit de l’encrier.

M. Bâ les entraîne dans les rues de Paris, ils apprennent à observer et sont émerveillés par la multitude des sujets possibles. Ils font aussi l’expérience de ce qui paraît si facile nécessite en réalité un long apprentissage et de la persévérance. Mais encore une fois, M. Bâ ne se place jamais en surplomb des enfants, lui aussi ratte et jette au panier ses essais infructueux. Chaque jour est l’occasion d’une nouvelle leçon et, quand M. Bâ entraîne la petite troupe des hauteurs de Paris, il leur apprend non pas à peindre la ville et le paysage majestueux qui s’ouvre à eux mais un fleuve lointain, comme pour montrer que l’inspiration est diverse. Sous les yeux des enfants (et de ceux du lecteur), M. Bâ ébauche un dessin qui apparaît d’abord brouillon avant de prendre forme et vie. Puis, Mr Bâ disparaît et est remplacé par un joueur de saxo, laissant derrière lui des carnets blancs pour qu’ils continuent à s’entraîner. Un magnifique livre illustré à l’encre chine autour des thèmes de la transmission, de la création et de l’inspiration. L’humanité qui se dégage du personnage de M. Bâ est réellement palpable et porteuse d’une pleine bienveillance.