Bonjour à tous et à toutes,

J’inaugure aujourd’hui une nouvelle série d’articles proposant de passer en revue plusieurs titres de littérature jeunesse traitant de la même histoire. Je me suis rendue compte qu’en tant que parent, j’ai des références en tête, des histoires que je voudrais partager avec mes enfants et je me trouve face à différentes versions d’un même classique, sans savoir a priori laquelle répondra le mieux à mes attentes.

Alice aux Pays des Merveilles est l’exemple typique de ce genre d’hésitation. A la fois, tout le monde connaît plus ou moins dans les grandes lignes, la trame narrative et pourtant lequel choisir ? Parce qu’Alice aux Pays des Merveilles s’adresse aussi aux adultes et est même édité dans la Pléïade, la difficulté du texte et son adaptation aux enfants sont donc donc cruciales, d’autant que s’ajoute la question de la traduction des jeux de mots de Lewis Caroll.

Le plus simple, est le Alice illustré par Eric Puybaret. Le récit se restreint à la descente dans le terrier jusqu’à la sortie de la maison du lapin blanc. Le texte se lit facilement et se comprend également très bien. Il a conservé quelques incises caractéristiques de la version originale. Les dessins, sont très doux, dans des tons lumineux. Une belle entrée en matière.

Plus difficile d’accès avec un texte rédigé sous forme d’interpellation du lecteur et de commentaires des illustrations du livres, vous trouverez Alice racontée aux Petits.  Petits, pas trop quand même de mon point de vue car le style un peu difficile pourrait décourager de jeunes lecteurs et rend la lecture à voie haute plus difficile, de même que l’écoute du texte. En revanche, ce petit livre permet de passer à un format de poche, moins illustré et laissant donc le champ libre à l’imagination. Autre point fort, les illustrations de ce livre sont celles de Theniel, contemporain de Lewis Caroll  à qui ce dernier a délégué la tâche d’illustrer son oeuvre. Lewis Caroll attachait une grande importance aux illustrations. Il avait lui même réalisé des dessins dans la version du récit donné à Alice Liddell. Pour le reste, on retrouve les grands chapitres des aventures d’Alice.

Autre version d’Alice, celle illustrée par Benjamin Lacombe. Le texte est celui d’Henri Parisot qui a traduit le récit aux éditions de la Pléïade. Le style très onirique de Benjamin Lacombe s’adapte très bien au récit.  Le lecteur pourra admirer de magnifiques illsutrations très travaillées sur des pages entières voire sur des doubles pages qui se déplient. Certaines sont en couleur, d’autres à l’encre.  Elle donnent tous vie au récit dont l’accès est difficile. A la maison, seule ma louloute de 5 ans qui est une bonne auditrice a vraiment été captivée. Pour celui qui lit à haute voix, il faudra s’adapter au style si particulier du texte, prendre son temps. A noter que la mise en page du texte lui même est également originale, accompagnant par des changements de police les modifications de la taille de notre héroïne.

Dernière version d’Alice illustrée par Rebecca Dautremer. Le texte est aussi celui du récit d’original mais avec quelques formulations qui le rendent plus accessibles. Les illustrations sont d’une grande douceur avec un souci détail tel que l’on pouvoir caresser les poils des animaux. La palette de couleur est dans les tons pastels un peu éteints, ce qui confère une certaine mélancolie à l’ensemble. Manifestement Rebecca Dautremer s’est inspirée du portrait d’Alice Lidell pour dessiner son Alice. Celle-ci est donc brune et non blonde comme les  versions de Théniel et de Disney. Le récit se présente sous  le format d’un album, plus facilement manipulable par  les enfants. Les pages de texte sont agrémentées de quelques illustrations à l’encre.

Je termine mon article par les multiples émissions de radio que l’on peut podcaster pour approfondir l’oeuvre de Lewis Caroll. La compagnie des Auteurs de France Culture a récemment consacré émissions à Alice aux Pays des Merveilles, en explorant les deux Alices mais aussi la Chasse aux Snark et Sylvie et Bruno, deux romans moins connus. L’émission aborde le thème du non sense et cherche les sources d’inspiration et la signification qui sous-tendent l’oeuvre. On approfondit la biographie de l’auteur qui était un logicien réputé, conservateur, et qui a pu pourtant produire un récit si éloigné de ces deux postulats, si fantaisiste et interrogeant la logique et le langage poussés dans leurs extrêmes retranchements.

Les nuits de France culture a également rediffusé à la fin de l’année dernière une série d’émissions réalisées pour le jour de Noël  1965 ( le premier lien est ici). Les grands noms de la littérature se croisent d’Aragon à  Michel Butor. On entend aussi les voies célèbres de Michel Bouquet et de Michel Galabru dans une adaptation des deux récits d’Alice particulièrement accessibles et bien réalisées. On peut également suivre la partie d’échecs de l’Autre Côté du Miroir. Les difficultés de traduction, les jeux de mots, les néologismes sont étudiées en profondeur, avec une grande érudition mais tout en restant accessible aux béotiens.

Le 28 décembre 2018, Les Nuits de France Culture a également rediffusé l’émission que les Nouveaux Chemins de la Connaissance avait consacré au non-sense (lien ici).

Enfin, on peut trouver en vidéo une conférence de l’Université de Nantes sur le thème “Pourquoi il faut relire Alice aux Pays des Merveilles” ( lien ici).

Et vous, lisez vous Alice à vos enfants ? Seriez vous intéressé par un article connexe sur le film de Tim Burton ?

• Alice aux Pays des Merveilles illustré par Eric Puybaret Editions La Martinière Jeunesse.
• Alice racontée aux petits aux éditions de l’Ecole des Loisirs.
• Alice aux Pays des Merveilles illustré par B. Lacombe et traduction d’Henri Parisot aux Editions Soleil
• Alice aux Pays des Merveilles illustré par Rebecca Dautremer Editions Gautier Languereau